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DE L’ESPRIT DES LOIS.


leur philosophie seule, il sembloit que le seul bonheur des autres pût augmenter le leur. » (Livre XXIV, chapitre X.)

Un éloge si outré de la secte de Zenon pourroit-il partir de la plume d’un chrétien ? Quand on a dit de cette secte orgueilleuse et impie qu’elle seule savoit faire les citoyens, qu’elle seule faisoit les grands hommes, qu’il n’y a jamais eu de religion dont les principes fussent plus dignes de l’homme et plus propres à former les gens de bien : que reste-t-il à dire de la religion chrétienne ? Mais la secte stoïcienne a de si grands charmes pour un sectateur de la religion naturelle, que l’on ne doit pas être surpris de l’enthousiasme avec lequel l’auteur en parle. Les stoïciens n’admettoient qu’un Dieu ; mais ce Dieu n’étoit autre chose que l’âme du monde. Ils vouloient que tous les êtres depuis les premiers fussent nécessairement enchaînés les uns avec les autres. Une nécessité fatale entrainoit tout. Ils m’oient l’immortalité de l’âme, et faisoient consister le souverain bonheur à vivre conformément à la nature. C’est le fonds du système de la religion naturelle. Les parenthèses que l’auteur met ici, pour nous dire qu’il est chrétien, sont de foi blés garants de sa catholicité. L’auteur riroit de notre simplicité, si nous le prenions pour ce qu’il n’est pas. Un chrétien ne parle point d’une secte impie comme l’auteur en parle ; écoutons-le encore quelques moments et nous le laisserons : « Quand Montézuma, dit-il, s’obstinoit tant à dire que la religion des Espagnols étoit bonne pour leur pays, et celle du Mexique pour le sien, il ne disoit pas une absurdité, parce qu’en effet les législateurs n’ont pu s’empêcher d’avoir égard à ce que la nature avait établi avant eux. n (Livre XXIV, chapitre XXIV.) « Lorsque la religion fondée sur le climat a trop choqué le climat d’un autre pays, elle n’a pu s’y