Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t5.djvu/369

Cette page n’a pas encore été corrigée
353
LIVRE XXVIII, CHAP. XXXVII.


de l’obéissance. Car, s’il est vrai qu’il ne faut pas changer lorsque les inconvénients égalent les avantages, encore moins le faut-il lorsque les avantages sont petits, et les inconvénients immenses. Or, si l’on fait attention à l’état où étoit pour lors le royaume, où chacun s’enivroit de l’idée de sa souveraineté et de sa puissance, on voit bien qu’entreprendre de changer partout les lois et les usages reçus, c’étoit une chose qui ne pouvoit venir dans l’esprit de ceux qui gouvernoient.

Ce que je viens de dire prouve encore que ce code des Établissements ne fut pas confirmé en parlement par les barons et gens de loi du royaume, comme il est dit dans un manuscrit de l’hôtel de ville d’Amiens, cité par M. Ducange [1]. On voit, dans les autres manuscrits, que ce code fut donné par saint Louis en l’année 1270 , avant qu’il partit pour Tunis. Ce fait n’est pas plus vrai ; car saint Louis est parti en 1269, comme l’a remarqué M. Ducange ; d’où il conclut que ce code auroit été publié en son absence. Mais je dis que cela ne peut pas être. Comment saint Louis auroit-il pris le temps de son absence pour faire une chose qui auroit été une semence de troubles, et qui eût pu produire, non pas des changements, mais des révolutions ? Une pareille entreprise avoit besoin, plus qu’une autre, d’être suivie de près, et n’étoit point l’ouvrage d’une régence foible, et même composée de seigneurs qui avoient intérêt que la chose ne réussit pas. C’étoit Matthieu, abbé de Saint-Denis [2], Simon de Clermont, comte

    exerce sur eux. Hais le peuple avait d’autres idées. Ce que Montesquieu trouvait inconsidéré en 1748, était accueilli comme une réforme nécessaire en 1789. De pareils exemples sont faits pour encourager ceux qui travaillent au bien de leur pays.

  1. Préface sur les Établissements. (M.)
  2. Tout ce passage, jusqu’à la fin du paragraphe, est en note dans A. B.