Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t4.djvu/20

Cette page n’a pas encore été corrigée

CHAPITRE III.


CE QUE C'EST QUE LA LIBERTÉ.


Il est vrai que dans les démocraties le peuple paroit faire ce qu’il veut ; mais la liberté politique ne consiste point à faire ce que l'on veut. Dans un État, c’est-à-dire dans une société où il y a des lois, la liberté ne peut consister qu’à pouvoir faire ce que l'on doit vouloir, et à n’être point contraint de faire ce que l'on ne doit pas vouloir.

Il faut se mettre dans l’esprit ce que c’est que l’indépendance, et ce que c’est que la liberté. La liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent [1] ; et si un citoyen pouvoit faire ce qu’elles défendent, il n’auroit plus de liberté, parce que les autres auroient tout de même ce pouvoir [2].

  1. « La maxime de Montesquieu, que les individus ont le droit de faire tout ce que les lois permettent est un principe de garantie. Il signifie que nul n'a le droit d’empêcher un autre de faire ce que les lois ne défendent pas ; mais il n’explique pas ce que les lois ont ou n’ont pas le droit de défendre. Or c’est là que la liberté réside. La liberté n’est autre chose que ce que les individus ont le droit de faire, et ce que la société n’a pas le droit d’empêcher.» Benjamin Constant, Cours de politique constitutionnelle, t. 1, p. 274.
  2. Omnes legum servt sumus ut liberi esse possimus, Cic, pro Cluentio, c. LIII.
    ___________