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XXIX
A L’ESPRIT DES LOIS.


Guasco qui le poussa, l'épée dans les reins [1] à réfuter des accusations qui n’étaient pas sans péril. « En méprisant de pareils dangers, écrit d’Alembert, M. de Montesquieu auroit cru les mériter, et l’importance de l'objet lui ferma les yeux sur la valeur de ses adversaires [2]. »

La Défense de l'Esprit des lois parut à Genève au commencement de l'année 1750. Elle ne portait pas de nom d’auteur, mais on sentait l’ongle du lion. Comme le disait Montesquieu, « ce qui y plaît est de voir, non pas mettre les vénérables théologiens à terre, mais de les y voir couler doucement [3] ». L’effet de cette réponse fut considérable.


« Cet ouvrage, nous dit d’Alembert, par la modération, la vérité, la finesse de plaisanterie qui y règnent, doit être regardé comme un modèle en ce genre. M. de Montesquieu, chargé par son adversaire d'imputations atroces, pouToit le rendre odieux sans peine ; il fit mieux, il le rendit ridicule. S'il faut tenir compte à l'agresseur d’un bien qu'il a fait sans le vouloir, nous lui devons une éternelle reconnaissance de nous avoir procuré ce chef-d’œuvre. Mais ce qui ajoute encore au mérite de ce morceau précieux, c’est que l'auteur s’y est peint lui-même sans y penser ; ceux qui l’ont connu croient l’entendre, et la postérité s’assurera, en lisant sa Défense, que sa conversation n’étoit pas inférieure à ses écrits ; éloge que bien peu de grands hommes ont mérité [4]. »


Jamais réponse n’a désarmé un ennemi. Le gazetier ecclésiastique revint à la charge dans les numéros du 24 avril et du 1er mai 1750 [5]. Il maintint tous les reproches qu’il avait faits à l’auteur. Sur les uns M. de Montesquieu essayait en vain de se justifier ; sur les autres il n’osait même pas tenter de se défendre. Suivait une longue liste d’objections accompagnées du mot : pas de réponse. C’est le refrain ordinaire. Quel est le journal qui n’ait pas toujours raison ?

  1. Lettre du 4 octobre 1752.
  2. Éloge de Montesquieu.
  3. Lettre à Mme du Deffant, 13 septembre 1755.
  4. Eloge de Montesquieu.
  5. Ces deux articles ont été aussi publiés à part sous le titre de Réponse à la Défense de l'Esprit des lois.