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CHAPITRE IV.


QUELQUES AVANTAGES DU PEUPLE CONQUIS.


Au lieu de tirer du droit de conquête des conséquences si fatales, les politiques auroient mieux fait de parler des avantages que ce droit peut quelquefois apporter au peuple vaincu. Ils les auroient mieux sentis, si notre droit des gens étoit exactement suivi, et s'il étoit établi dans toute la terre.

Les États que l’on conquiert ne sont pas ordinairement dans la force de leur institution. La corruption s'y est introduite ; les lois y ont cessé d’être exécutées ; le gouvernement est devenu oppresseur. Qui peut douter qu’un État pareil ne gagnât et ne tirât quelques avantages de la conquête même, si elle n’étoit pas destructrice [1]. Un gouvernement parvenu au point où il ne peut plus se réformer lui-même, que perdroit-il à être refondu [2] ? Un conquérant qui entre chez un peuple, où, par mille ruses et mille artifices, le riche s’est insensiblement pratiqué une infinité de moyens d’usurper ; où le malheureux qui gémit, voyant ce qu’il croyoit des abus devenir des lois, est dans l’oppression, et croit avoir tort de la sentir ; un conqué-

  1. A. B. Destructive. Corrigé dans l'édition de 1751.
  2. A. B. Ne perdroit pas beaucoup à être refondu. Corrigé dans l'édition de 1751.