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CHAPITRE IX.


COMBIEN LA NOBLESSE EST PORTÉE
A DÉFENDRE LE TRÔNE.


La noblesse angloise s'ensevelit avec Charles Ier sous les débris du trône ; et, avant cela, lorsque Philippe II fit entendre aux oreilles des François le mot de liberté, la couronne fut toujours soutenue par cette noblesse, qui tient à honneur d'obéir à un roi, mais qui regarde comme la souveraine infamie de partager la puissance avec le peuple [1].

On a vu la maison d'Autriche travailler sans relâche à opprimer la noblesse hongroise. Elle ignoroit de quel prix elle lui seroit quelque jour. Elle cherchoit chez ces peuples de l'argent qui n'y étoit pas ; elle ne voyoît pas des hommes qui y étoient. Lorsque tant de princes partageoient entre eux ses États, toutes les pièces de sa monarchie, immobiles et sans action, tomboient, pour ainsi dire, les unes sur les autres. Il n'y avoit de vie que dans cette noblesse, qui s'indigna, oublia tout pour combattre, et crut qu'il étoit de sa gloire de périr et de pardonner [2].

  1. Ce sentiment n'était pas moins vif en 1789, et ce ne fut pas une des moindres causes qui hâtèrent la chute de la monarchie.
  2. Allusion au Moriamur pro rege nostro Maria Theresa, et à la conduite de la noblesse de Hongrie dans la guerre de la succession d'Autriche, 1741-1748.
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