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CHAPITRE VII.


CONTINUATION DU MÊME SUJET.


Le principe de la monarchie se corrompt lorsque les premières dignités sont les marques de la première servitude, lorsqu’on ôte aux grands le respect des peuples, et qu’on les rend de vils instruments du pouvoir arbitraire.

Il se corrompt encore plus, lorsque l’honneur a été mis en contradiction avec les honneurs, et que l'on peut être à la fois couvert d’infamie [1] et de dignités [2].

Il se corrompt lorsque le prince change sa justice en sévérité ; lorsqu’il met, comme les empereurs romains, une tète de Méduse sur sa poitrine [3] ; lorsqu’il prend cet air menaçant et terrible que Commode faisoit donner à ses statues [4].

  1. Sous le règne de Tibère on éleva des statues, et l'on donna les ornements triomphaux aux délateurs : ce qui avilit tellement ces honneurs, que ceux qui les avoient mérités les dédaignèrent. Fragment de Dion, liv. LVIII, ch. XIV, tiré de l'Extrait des vertus et des vices, de Const. Porphyrog. Voyez dans Tacite comment Néron, sur la découverte et la punition d’une prétendue conjuration, donna à Petronius Turpilianus, à Nerva, à Tigellinus, les ornements triomphaux. Annales, liv. XV, ch. LXXII. Voyez aussi comment les généraux dédaignèrent de faire la guerre, parce qu’ils en méprisoient les honneurs. Pervulgatis triumphi insignibus. Tacite, Annales, liv. XIII, ch. LIII . (M.)
  2. Est-ce une allusion au cardinal Dubois ?
  3. Dans cet état, le prince savoit bien quel étoit le principe de son gouvernement. (M.)
  4. Hérodien. (M.) Livre I, Vie de Commode.