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DE L'ESPRIT DES LOIS.

Le luxe est donc nécessaire dans les États monarchiques ; il l'est encore dans les États despotiques. Dans les premiers, c'est un usage que l'on fait de ce qu'on possède de liberté : dans les autres, c'est un abus qu'on fait des avantages de sa servitude; lorsqu'un esclave [1] choisi par son maître pour tyranniser ses autres esclaves, incertain pour le lendemain de la fortune de chaque jour, n'a d'autre félicité que celle d'assouvir l'orgueil, les désirs et les voluptés de chaque jour.

Tout ceci mène à une réflexion. Les républiques finissent par le luxe ; les monarchies, par la pauvreté [2].

  1. A. De sa servitude ; un esclave choisi par son maître, etc.
  2. Opulentia paritura mox egestatem. Florus, liv. III, C. XII. (M.) La monarchie ou plutôt l'empire romain a fini par la ruine universelle ; mais on ne voit pas pourquoi une monarchie, dans laquelle le peuple vit d'agriculture, de commerce et d'industrie, finirait par la pauvreté. Quand la monarchie française est tombée en 1789, elle était au plus liant degré de prospérité matérielle.
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