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LIVRE V, CHAP. XI.

Le cardinal de Richelieu, pensant peut-être qu’il avoit trop avili les ordres de l'État, a recours, pour le soutenir, aux vertus du prince et de ses ministres [1] ; et il exige d’eux tant de choses, qu’en vérité il n’y a qu’un ange qui puisse avoir tant d’attention, tant de lumières, tant de fermeté, tant de connoissances ; et on peut à peine se flatter que, d’ici à la dissolution des monarchies, il puisse y avoir un prince et des ministres pareils.

Comme les peuples qui vivent sous une bonne police sont plus heureux que ceux qui, sans règle et sans chefs, errent dans les forêts ; aussi les monarques qui vivent sous les lois fondamentales de leur État [2], sont-ils plus heureux que les princes despotiques, qui n’ont rien qui puisse régler le cœur de leurs peuples, ni le leur.

  1. Testament politique. (M.)
  2. Pour Montesquieu les lois fondamentales de la monarchie française sont avant tout les privilèges du clergé, de la noblesse et du Parlement, Sup., II, IV.
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