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CHAPITRE X.


DIFFÉRENCE DE L'OBÉISSANCE
DANS LES GOUVERNEMENTS MODÉRÉS
ET DANS LES GOUVERNEMENTS
DESPOTIQUES.


Dans les États despotiques la nature du gouvernement demande une obéissance extrême ; et la volonté du prince, une fois connue, doit avoir aussi infailliblement son effet qu’une boule jetée contre une autre doit avoir le sien.

Il n’y a point de tempérament, de modifications, d’accommodements, de termes, d’équivalents, de pourparlers, de remontrances ; rien d’égal ou de meilleur à proposer ; l’homme est une créature qui obéit à une créature qui veut.

On n’y peut pas plus [1] représenter ses craintes sur un événement futur, qu’excuser ses mauvais succès sur le caprice de la fortune. Le partage des hommes, comme des bêtes, y est l’instinct, l’obéissance, le châtiment.

Il ne sert de rien d’opposer [2] les sentiments naturels, le respect pour un père, la tendresse pour ses enfants et ses femmes, les lois de l’honneur, l’état de sa santé ; on a reçu l'ordre, et cela suffit.

  1. A. Dans un tel pays on ne peut pas plus représenter, etc. La correction est faite dans l’édition de 1751.
  2. A. D’opposer alors les sentiments, etc.