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ANALYSE RAISONNÉE


sidérable, que les politiques grecs crurent devoir s’attacher à régler le nombre des citoyens.

Notre auteur, soutenant pour ainsi dire son vol, mesure comme un aigle la terre d’un œil ferme, et, à l'aide des monuments de l’antiquité, il voit que l’Italie, la Sicile, l’Asie Mineure, l’Espagne, la Germanie, étaient, à peu près comme la Grèce, pleines de petits peuples, et regorgeoient d’habitants ; ainsi on n’y avoit pas besoin de lois pour en augmenter le nombre ; mais, comme toutes ces petites républiques furent englouties dans une grande, on vit insensiblement l’univers se dépeupler.

Comme les Romains furent le peuple du monde le plus sage, et que, pour réparer ses pertes, il eut besoin du secours des lois, notre auteur, profitant de l’histoire et de la jurisprudence, si liées à l’esprit de conseil et aux talents de l’administration, recueille les lois que les Romains firent à ce sujet.

Il proteste de ne point parler ici de l’attention que les Romains eurent pour réparer la perte des citoyens à mesure qu’ils en perdirent, faisant des associations, donnant les droits de cité, et trouvant une pépinière de citoyens dans leurs esclaves : il se borne à parler de ce qu’ils firent pour réparer la perte des hommes.

Jamais les vues de sagesse et de prévoyance qui dictèrent ces lois n’ont eu une application plus nécessaire que dans les circonstances de nos jours. Ainsi il n’est point indifférent que je suive pas à pas notre auteur dans leur origine, leurs motifs, leurs avantages, leur suite, leurs infractions. Notre auteur a été très-exact à en recueillir toutes les vues, et assez sage pour en choisir les plus essentielles.

Les anciennes lois de Rome cherchèrent à déterminer les citoyens au mariage. Les censeurs y eurent l’œil, et, selon les besoins, ils y engagèrent et par la honte et par les peines.

La corruption des mœurs dégoûta du mariage, et détruisit la censure elle-même.

Le nombre des citoyens fut assez diminué par les discordes