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ANALYSE RAISONNÉE

Il commence par expliquer la raison de l’usage de la monnoie, qui est la nécessité des échanges, vu l'inégalité des productions de chaque pays ; sa nature, qui est de représenter la valeur des marchandises comme signe ; sa forme, qui est l'empreinte de chaque État. Il examine ensuite dans quel rapport la monnoie doit être, pour la prospérité de l'État, avec les choses qu’elle représente. Il distingue les monnoies réelles des monnoies idéales. Les réelles sont, dit-il, d’un certain poids et d’un certain titre ; elles deviennent idéales lorsqu’on retranche une partie du métal de chaque pièce en lui laissant le même nom. Pour que le commerce fleurisse, les lois doivent faire employer des monnoies réelles, éloignant toute opération qui puisse les rendre idéales, à moins de vouloir donner à l’état de terribles secousses ; témoin les plaies profondes et cruelles qui saignent encore dans quelques pays.

Notre auteur nous instruit que l'or et l’argent augmentent chez les nations policées, soit qu’elles tirent ces métaux de chez elles, soit qu’elles aillent les chercher là où ils sont, et qu’ils diminuent chez les nations barbares.

Il fait voir que l'argent des mines de l’Amérique est une marchandise de plus que l’Europe reçoit en troc, et qu’elle envoie en troc aux Indes. Ainsi une plus grande quantité d’or et d’argent est favorable, si on regarde ces métaux comme marchandises ; elle ne l’est point lorsqu’on les regarde comme signes, parce que leur abondance choque leur qualité de signes, qui est beaucoup fondée sur la rareté. Ainsi c’est en raison de la quantité de ces métaux que l’intérêt de l’argent est diminué ou augmenté.

Il nous montre une grande vérité ; savoir, que le prince ne peut pas plus fixer la valeur des marchandises qu’ordonner que le rapport, par exemple, d’un à dix soit égal à celui d’un à vingt : car l’établissement d’un prix des choses dépend fondamentalement de la raison totale des choses au total des signes.

Il passe à l’article du change. Comme tout est du ressort