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DE L’ESPRIT DES LOIS.


ont avec les autres choses, en rapprochant ici les idées qui paroissent éloignées, on justifie l’ouvrage par l’ouvrage même.

Bien loin que notre auteur ait jamais prétendu justifier les effets physiques du climat, il a fait au contraire une protestation authentique « qu’il ne justifie pas les usages, mais qu’il en rend les raisons [1] ».

Il rend cette justice à notre religion qu’elle sait triompher du climat et des lois qui en résultent, « C’est, dit-il [2], le christianisme qui dans nos climats a ramené cet âge heureux où il n’y avoit ni maître ni esclave. « Et ailleurs [3] il remarque que « nous aimons, en fait de religion, tout ce qui suppose un effort ». Il le prouve par l’exemple du célibat, qui a été plus agréable aux peuples à qui, par le climat, il sembloit convenir le moins.

Il rend hommage à notre religion, qui, a malgré la grandeur de l’empire et le vice du climat, a empêché le despotisme de s’établir en Éthiopie, et a porté au milieu de l’Afrique les mœurs de l’Europe [4] ».

Et, comme il est convaincu que les bonnes maximes, les bonnes lois, la vraie religion, sont indépendantes par elles-mêmes de tout effet physique quelconque, que ce qui est bon dans un pays est bon dans un autre, et qu’une chose ne peut être mauvaise dans un pays sans l’être dans un autre, il s’est attaché à faire sentir la nécessité des bonnes lois pour vaincre les effets contraires du climat.

C’est pourquoi, en parlant du caractère des Indiens, il dit : « Comme une bonne éducation est plus nécessaire aux enfants qu’à ceux dont l’esprit est dans sa maturité, de même les peuples de ces climats ont plus besoin d’un législateur sage que les peuples du nôtre, etc. [5] ».

  1. Liv. XVI, ch. IV.
  2. Liv. XV, ch. VII.
  3. Liv. XXV, ch. IV.
  4. Liv. XXIV, ch. III.
  5. Liv. XIV, ch. III.