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PRÉFACE DU TRADUCTEUR.


l’art. Il n’est point, disent-ils, selon les règles. Mais si l’ouvrage a plu, vous verrez que le cœur ne leur a pas dit toutes les règles.

Un homme qui se mêle de traduire, ne souffre point patiemment que l’on n’estime pas son auteur autant qu’il le fait ; et j’avoue que ces messieurs m’ont mis dans une furieuse colère : mais je les prie de laisser les jeunes gens juger d’un livre qui, en quelque langue qu’il ait été écrit, a certainement été fait pour eux. Je les prie de ne point les troubler dans leurs décisions. Il n’y a que des têtes bien frisées et bien poudrées qui connoissent tout le mérite du Temple de Gnide.

A l’égard du beau sexe, à qui je dois le peu de moments heureux que je puis compter dans ma vie, je souhaite de tout mon cœur que cet ouvrage puisse lui plaire. Je l’adore encore ; et, s’il n’est plus l’objet de mes occupations, il l’est de mes regrets.

Que si les gens graves désiroient de moi quelque ouvrage moins frivole, je suis en état de les satisfaire. Il y a trente ans que je travaille à un livre de douze pages, qui doit contenir tout ce que nous savons sur la métaphysique, la politique et la morale, et tout ce que de grands auteurs ont oublié dans les volumes qu’ils ont donnés sur ces sciences-là.