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LETTRE CLVII.





*LETTRE CLVII.


ZACHI A USBEK.


A PARIS.




O ciel ! un barbare m’a outragée jusque dans la manière de me punir ! Il m’a infligé ce châtiment qui commence par alarmer la pudeur ; ce châtiment qui met dans l’humiliation extrême ; ce châtiment qui ramène, pour ainsi dire, à l’enfance.

Mon âme, d’abord anéantie sous la honte, reprenait le sentiment d’elle-même, et commençait à s’indigner, lorsque mes cris firent retentir les voûtes de mes appartements. On m’entendit demander grâce au plus vil de tous les humains, et tenter sa pitié, à mesure qu’il était plus inexorable.

Depuis ce temps, son âme insolente et servile s’est élevée sur la mienne. Sa présence, ses regards, ses paroles, tous les malheurs viennent m’accabler. Quand je suis seule, j’ai du moins la consolation de verser des larmes ; mais lorsqu’il s’offre à ma vue, la fureur me saisit : je la trouve impuissante, et je tombe dans le désespoir.

Le tigre ose me dire que tu es l’auteur de toutes ces barbaries. Il voudrait m’ôter mon amour, et profaner jusqu’aux