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LETTRE CXII.

On ne saurait trouver dans l’Amérique, la cinquantième partie [1] des hommes qui y formaient de si grands empires.

L’Asie n’est guère en meilleur état. Cette Asie Mineure, qui contenait tant de puissantes monarchies, et un nombre si prodigieux de grandes villes, n’en a plus que deux ou trois. Quant à la grande Asie, celle qui est soumise au Turc n’est pas plus peuplée ; [2] pour celle qui est sous la domination de nos rois, si on la compare à l’état florissant où elle était autrefois, on verra qu’elle n’a qu’une très-petite partie des habitants qui y étaient sans nombre du temps des Xerxès et des Darius.

Quant aux petits États qui sont autour de ces grands empires, ils sont réellement déserts ; tels sont les royaumes d’Irimette, de Circassie et de Guriel. Ces princes, [3] avec de vastes États, comptent à peine cinquante mille sujets.

L’Égypte n’a pas moins manqué que les autres pays.

Enfin, je parcours la terre, et je n’y trouve que des délabrements : [4] je crois la voir sortir des ravages de la peste et de la famine.

L’Afrique a toujours été si inconnue, qu’on ne peut en parler si précisément que des autres parties du monde ; mais, à ne faire attention qu’aux côtes de la Méditerranée, connues de tout temps, on voit qu’elle a extrêmement déchu de ce qu’elle était sous les Carthaginois et les Romains. [5] Aujourd’hui, ses princes sont si faibles, que ce sont les plus petites puissances du monde.

  1. A. C. La deux centième partie des hommes qui y formaient autrefois de si grands empires.
  2. A. C. N’est pas plus pleine, et pour celle, etc.
  3. A. C. Tous ces princes.
  4. A. C. Je n’y trouve que délabrement.
  5. A. C. De ce qu’elle était, lorsqu’elle était province romaine.