elle y réussit ; car cela approche de l’enfance. Ah, bon Dieu ! dis-je en moi-même, ne sentirons-nous jamais que le ridicule des autres ? C’est peut-être un bonheur, disais-je ensuite, que nous trouvions de la consolation dans les faiblesses d’autrui. Cependant j’étais en train de me divertir ; et je dis : Nous avons assez monté ; descendons à présent, et commençons par la vieille qui est au sommet. Madame, vous vous ressemblez si fort, cette dame à qui je viens de parler et vous, qu’il semble que vous soyez deux sœurs ; je vous crois, à peu près, de même âge.[1] Vraiment, monsieur, me dit-elle, lorsque l’une mourra, l’autre devra avoir grand’peur : je ne crois pas qu’il y ait d’elle à moi deux jours de différence. Quand je tins cette femme décrépite, j’allai à celle de soixante ans. Il faut, madame, que vous décidiez un pari que j’ai fait : j’ai gagé que cette dame et vous, lui montrant la femme de quarante ans, étiez de même âge. Ma foi, dit-elle, je ne crois pas qu’il y ait six mois de différence. Bon, m’y voilà ; continuons. Je descendis encore, et j’allai à la femme de quarante ans. Madame, faites-moi la grâce de me dire si c’est pour rire que vous appelez cette demoiselle, qui est à l’autre table, votre nièce ? Vous êtes aussi jeune qu’elle ; elle a même quelque chose dans le visage de passé, que vous n’avez certainement pas : et ces couleurs vives qui paraissent sur votre teint… Attendez, me dit-elle : je suis sa tante ; mais sa mère avait, pour le moins, vingt-cinq ans plus que moi : nous n’étions pas de même lit ; j’ai ouï dire à feu ma sœur que sa fille et moi naquîmes la même année. Je le disais bien, madame, et je n’avais pas tort d’être étonné.
- ↑ A. C. Deux sœurs, et je ne crois pas que vous soyez plus âgées l’une que l’autre. Et vraiment, monsieur, etc.