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Pendant le repas, l’abbé Laugier évita de parler de Jeanne. En quittant la table, il dit à Brigitte :

« Vous nous servirez le café dans le jardin. Vous ajouterez une tasse pour l’étrangère, et vous nous l’amènerez.

– Oui, monsieur le curé. »

Deux heures de sommeil, suivies d’un repas substantiel, avaient suffi pour rendre des forces à la pauvre mère fugitive.

« Vous prendrez tout à l’heure le café dans le jardin avec M. Le curé », lui dit la vieille servante. Un coup de sonnette avertit Brigitte qu’elle pouvait servir le café. L’abbé, Étienne et Mme Darier descendaient au jardin. L’artiste tirait de sa poche un carnet sur lequel il avait commencé, de mémoire, à crayonner le portrait de l’inconnue. Brigitte amena la veuve de Pierre Fortier suivie du petit Georges qui, redevenu gai, traînait joyeusement derrière lui son dada de carton. D’un rapide coup d’œil, le prêtre examina la physionomie de Jeanne, tandis que Clarisse éloignait sa chaise de la table avec un sentiment d’involontaire répulsion.

« Approchez-vous, madame, et asseyez-vous, dit l’abbé en désignant un siège. Un peu de café vous fera grand bien. »

La jeune femme obéit. Le petit Georges s’approcha.

« Monsieur le curé, dit-il, voulez-vous me permettre de jouer dans le jardin ? Je ne toucherai pas aux fleurs…

– Oui, oui, va, mon enfant.

– Merci, monsieur le curé. »

Le bambin embrassa sa mère et s’éloigna en faisant rouler son cheval sur le sable fin des allées. Brigitte servait le café. Étienne, un crayon à la main, rectifiait les lignes de son esquisse.

« Vous allez mieux, madame ? demanda le prêtre.

– Oh ! oui, monsieur ! Mes forces sont revenues.

– Assez, pour vous permettre de continuer votre voyage ? »

Jeanne, avant de répondre, hésita. L’abbé reprit :