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Jeanne Fortier, madame », répondit sentencieusement le caissier.

Mme Bertin ne formula point d’objections, mais elle ne se sentait pas convaincue. Le caissier reprit :

« Le juge d’instruction vous prie de vous présenter à son cabinet le plus tôt possible. Il m’a chargé de vous le dire.

– J’irai.

– Maintenant, causons des affaires de mon cher et regretté patron. Les livres sont détruits jusqu’au dernier feuillet, madame ; mais je me fais fort de les reconstituer.

– Au moment du sinistre, mon frère avait-il de l’argent en caisse ?

– Une forte somme… trop forte, hélas !

– Et tout est perdu ?

– Tout.

– Alors nous sommes en face d’un passif considérable ?

– Près de deux cent mille francs.

– Deux cent mille francs ! répéta Mme Bertin avec épouvante. Comment les payer ? C’est impossible, puisque je n’ai pas de fortune.

– Rassurez-vous, madame. Les sommes que devait M. Labroue seront intégralement payées par les compagnies auxquelles mon regretté patron avait assuré l’usine et son matériel. Ces compagnies sont solides. Donc, je vous le répète, tout sera payé et votre frère ne fera perdre un sou à qui que ce soit.

– Les compagnies d’assurance sont-elles prévenues ?

– Ce matin, à la suite des lettres que j’avais écrites, leurs inspecteurs sont venus dresser procès-verbal.

– Ainsi tout est perdu !… reprit Mme Bertin avec un soupir. L’enfant de mon frère ne possédera rien !

– Il lui restera le terrain sur lequel s’élevaient les constructions d’usines.

– Ce terrain sans les constructions est d’une valeur bien minime et difficilement réalisable. Heureusement Lucien ne me quittera point, et le peu que j’ai lui restera après moi. »