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essayant de sauver la caisse et les papiers de M. Labroue. Il fallait que personne ne pût douter de sa mort, et que si la voix de Jeanne Fortier s’élevait contre lui, cette voix ne fût point écoutée.

Jacques connaissait à merveille et de longue date la topographie du pavillon. Il savait qu’une fenêtre placée dans l’escalier conduisant à l’appartement de M. Labroue s’ouvrait sur la campagne, derrière l’usine. Au lieu de pénétrer dans le cabinet, il gravit en trois bonds les marches brûlantes de l’escalier, atteignit la fenêtre, poussa les cris de détresse et d’appel qui avaient porté le trouble et l’effroi dans tous les cœurs, et à moitié aveuglé, à demi asphyxié, s’élança par l’ouverture.

Peu après un craquement formidable se faisait entendre et le toit du pavillon et le premier étage s’effondraient sur le rez-de-chaussée.

Le contremaître était en rase campagne, sain et sauf, et courait à travers les terres labourées, afin de gagner une route sûre. Une heure après, il tombait exténué de fatigue dans un des massifs du bois de Vincennes.

« Enfin, se dit-il, je suis sauvé ! »

Dès les premières clartés de l’aube, il écarta ses vêtements et retira les liasses de billets de banque et les papiers volés dans la caisse qu’il portait sur la poitrine entre le linge et la chair. Il plia soigneusement les produits de son crime, se servit de son mouchoir pour les envelopper, se leva et se dirigea vers Paris.

Là, il se dirigea vers une maison de confection dont, une heure après, il sortait complètement transformé. Sa figure seule restait reconnaissable, et devait même attirer l’attention à cause de la nuance insolite de sa barbe et de ses cheveux. Jacques entra chez un coiffeur, se fit raser et couper les cheveux.

« N’auriez-vous pas de quoi me teindre le poil ? demanda-t-il ensuite en riant. La couleur rouge n’est point à la mode.

– Mais si, monsieur, certainement, répondit le coiffeur.

– Et ça tiendra ?