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sans vous donner une jolie gratification à titre d’indemnité.

– Je ne demande rien, fit la jeune veuve d’un ton hautain.

– Vous lui en voulez donc bien au patron ?… »

Jeanne ne put contenir un geste d’impatience.

« Monsieur David, fit-elle, ne parlons plus de cela. Voici les clefs. Vous me remettrez celle du bureau de M. Labroue aussitôt que vous aurez fini de ranger. »

David se retira, en grommelant entre ses dents :

« Je crois que le patron passerait un vilain quart d’heure si elle le tenait dans un petit coin, entre quatre-z-yeux. »

Jeanne allait et venait, rangeant à droite et à gauche. Tout à coup une idée lui traversa l’esprit.

« Ah ! murmura-t-elle, il ne faut pas que je laisse ce maudit pétrole dans le bidon qui appartient à l’usine. Je vais le transvaser dans des bouteilles que j’emporterai en partant. »

Sortant aussitôt de la loge, elle alla droit à la resserre. Le bidon à pétrole était sur une tablette, à côté de quelques bouteilles vides. Jeanne se mit en devoir de transvaser le contenu. Elle achevait de remplir la première bouteille quand un coup de sonnette retentit. Elle ouvrit. C’était le caissier.

M. Ricoux entra, referma la porte derrière lui et passa devant Jeanne, qui lui dit bonjour et qu’il salua légèrement. Tout à coup, il s’arrêta en face de la réserve ouverte.

« Cela sent encore le pétrole, madame Fortier, dit-il.

– Cela n’est point étonnant, monsieur, répliqua Jeanne d’un ton sec, je mets dans des bouteilles celui que contient le bidon. Il est à moi ce pétrole. Je l’emporte en m’en allant. On n’aura plus peur que je mette le feu à l’usine. »

Ricoux murmura entre ses dents :

« On a toujours raison d’avoir peur. Il y a de méchantes gens. Il y a des gens haineux qui font le mal pour le mal. »

Jacques, en ce moment, aborda le caissier.