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donné des ordres à tout son personnel pour les travaux de la journée, car, ayant rendez-vous avec Ovide depuis plusieurs jours, il lui faudrait aller chez son banquier pour y prendre la somme destinée à son complice. Il allait quitter l’usine lorsqu’on lui apporta un télégramme. C’était la dépêche d’Ovide, contremandant le rendez-vous donné. Paul Harmant la lut et fut singulièrement surpris.

« Ah ! ça, quelle mouche le pique ? fit-il. Que signifie ce retard ? Une absurde lubie, sans doute. Eh bien, nous remettrons à demain nos adieux. »

À onze heures, il fit mander Lucien.

« Nous déjeunerons ensemble, mon cher enfant », lui dit-il.

Lucien suivit le millionnaire au restaurant.

Voyons ce qui se passait pendant ce temps rue de Seine, au Rendez-vous des boulangers. Jeanne Fortier y avait fait une apparition de grand matin. Les garçons boulangers et les porteuses de pain qui s’y trouvaient déjà lui parurent avoir une attitude mystérieuse et singulière. Cela l’intrigua si fort qu’elle interpella le Lyonnais.

« Ah ! ça, qu’est-ce que vous avez donc tous ? On a l’air de se défier de moi. On me regarde d’une drôle de manière…

– Je vais vous dire, maman Lison, répliqua le Lyonnais, d’un air embarrassé ; c’est qu’on a quelque chose à vous annoncer…

– Quelque chose de pénible ? » balbutia-t-elle.

Ce fut la patronne de la maison qui répondit :

« Non pas ! Bien au contraire, maman Lison. On a eu un grand chagrin quand on a su l’accident qui vous était arrivé. Les braves gens qui viennent ici et qui vous connaissent se sont dit les uns aux autres : Puisque la chance a permis que notre bonne mère Lison en réchapper il faut lui prouver que nous l’aimons en lui offrant un beau bouquet et un banquet. Voilà…

– Oh !… mes amis… mes amis… », commença Jeanne.

Il lui fut impossible de continuer. L’émotion lui coupa la voix.