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Ovide qui montait dans son fiacre se retourna, mais aucun soupçon ne traversa son esprit.

Néanmoins, quand la voiture eut parcouru un espace de cinquante mètres, il regarda par le petit carreau percé à l’arrière de la caisse. Il aperçut encore le fiacre dont les lanternes rouges, remarquées par lui, le guidaient. Il fronça le sourcil. Et, baissant la glace qui se trouvait entre lui et le siège du cocher, il dit :

« Quittez l’avenue. Prenez à gauche et gagnez les Ternes.

– Pourquoi ? demanda le grand industriel.

– Je t’expliquerai cela tout à l’heure. »

Le cocher avait obéi et, par une rue latérale, il se dirigeait vers la barrière des Ternes. Ovide mit de nouveau son œil à son observatoire. Le fiacre était toujours à vingt pas en arrière, conservant sa distance.

« Ah ! la gueuse ! dit Soliveau les dents serrées.

– Mais enfin, qu’y a-t-il donc ? murmura Paul Harmant.

– Il y a qu’on nous file ! Voilà ce qu’il y a ! »

Le millionnaire devint livide.

« Oh ! rassure-toi ! Tu n’es pour rien là-dedans. C’est moi seul qu’on suit, et je sais qui me suit ainsi. C’est une femme.

– Qu’est-ce que cela signifie ?

– Ça signifie que la nommée Amanda Régamy, à qui j’ai brûlé la politesse à Bois-le-Roi, s’est mis dans la cervelle de savoir où je demeure et qui est au juste le baron de Reiss. Mais ce n’est pas encore aujourd’hui qu’elle connaîtra le gîte de ce brave Ovide Soliveau ! »

Tout en parlant, Soliveau examinait avec la plus grande attention la toilette de son compagnon de route. Paul Harmant portait un pardessus de demi-saison, de couleur claire, et un chapeau de soie à haute forme. Ovide, au contraire, était revêtu d’un paletot foncé et coiffé d’un petit chapeau de feutre rond. Nous savons déjà que les deux hommes avaient à très peu de choses près la même taille.

« Faisons un échange, dit Soliveau au millionnaire.