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justice un signalé service que de faire arrêter cette femme. »

Déjà le misérable se dirigeait vers la porte. Georges s’élança pour lui barrer le passage et lui dit :

« Un moment, monsieur, je vous prie ! Cette femme se nomme Lise Perrin. Je ne lui connais et ne veux pas lui connaître d’autre nom. Mais fût-elle Jeanne Fortier, elle est sous ma protection. Entrée ici librement, elle en sortira libre. Retirez-vous, madame. Retirez-vous sans crainte… »

Jeanne fit quelques pas en chancelant.

« Mais, s’écria Paul Harmant, c’est insensé ! c’est…

– Vous êtes chez moi, monsieur, et je n’admettrai aucun commentaire sur ma conduite. Lise Perrin ! Allez en paix ! »

L’évadée de Clermont se précipita sur la main de Georges, l’appuya contre ses lèvres avec une reconnaissance exaltée, puis s’élança dehors, Paul Harmant voulut faire un pas pour la suivre. Pour la seconde fois, Georges lui barra le passage.

« Vous veniez me parler d’affaires, je crois, lui dit-il.

– Pourquoi avez-vous laissé partir cette femme ?

– Est-ce que par hasard elle vous ferait peur ? »

Ces mots firent comprendre à Paul Harmant l’imprudence qu’il venait de commettre, en montrant contre Jeanne un acharnement que rien ne semblait justifier.

« Peur ! À moi ! balbutia-t-il.

– Je vous affirme que l’on pourrait le croire ! Si la pauvre femme est véritablement Jeanne Fortier, il faut pardonner une telle démarche à une mère, même criminelle ! Si, au contraire, elle n’est pas Jeanne Fortier, mais Lise Perrin, non seulement nous ne devons pas blâmer sa démarche, mais nous devons l’admirer. Elle prouve un grand cœur ! »

Le millionnaire avait eu le temps de reprendre son sang-froid.

« Vous avez raison, dit-il ; je n’ai pas été maître de ma colère, en ayant, ou, si vous le préférez, en croyant avoir devant moi la misérable qui a tué le père de Lucien Labroue, mon gendre futur. »