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touchée déjà, Lucie se sentit remuée jusqu’au fond des entrailles.

« Relevez-vous, dit-elle, je vous en conjure !

– Non ! laissez-moi vous implorer à genoux.

– Je l’ai déjà dit, mon cœur n’est point à vendre. »

Mary porta ses deux mains à son front en se relevant.

« Je me vengerai ! » fit-elle ensuite.

Et d’un pas automatique, elle quitta la chambre de sa rivale. Lucie murmura, en joignant les mains :

« Mon dieu, pardonnez-lui… La souffrance égare sa raison… »

En ce moment, la porte s’ouvrit et Jeanne Fortier parut. Elle vit la jeune fille, le visage défait, et courut à elle en s’écriant :

« Vos yeux sont pleins de larmes !… que s’est-il passé ? »

Lucie se jeta dans les bras de maman Lison et elle raconta la terrible scène…

* * *

Nous avons quitté Lucien Labroue, épouvanté de la révélation terrible qui venait de lui être faite.

« C’est une calomnie ! s’écria-t-il.

– Non, répondit le millionnaire ; c’est une vérité absolue.

– Vous avez parlé de preuves, monsieur, je les attends.

– Je vous ai dit, reprit-il, que celle que vous croyez aimer est inscrite sur les registres de l’hospice sous le numéro matricule 9.

– Je savais cela. Lucie elle-même me l’avait appris.

– Eh bien, refuserez-vous d’ajouter foi au procès-verbal de dépôt aux Enfants-Trouvés, relatant le nom de la mère ? »

Paul Harmant ouvrit son portefeuille, en retira le procès-verbal et le présenta au jeune homme, qui le lui arracha plutôt qu’il ne le prit et le lut fiévreusement. Le terrible papier s’échappa de la main tremblante de Lucien.

« C’est vrai… balbutia-t-il avec accablement : Lucie est la fille de Jeanne Fortier.