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– Est-ce de mon amour pour Lucie que vous parlez ainsi ?

– Oui, c’est votre amour pour Lucie.

– Expliquez-vous donc, monsieur ! Je le veux ! Je l’exige !

– Savez-vous quelle est cette Lucie à qui vous voulez donner votre nom !

– Oui, monsieur, une honnête fille.

– Une orpheline déposée, il y a vingt et un ans à l’hospice des Enfants-Trouvés, et inscrite sur les registres de l’hospice sous le numéro matricule 9. Le savez-vous ?

– Je le sais. Ce n’est pas pour l’enfant abandonnée qu’est la honte : c’est pour les parents coupables de l’abandon.

– Soit ! fit le millionnaire d’un rire mauvais. Ce sont là des sentiments nobles et généreux, mais vous n’avez pas cherché vous-même de qui était née cette fille ?

– Que m’importe ? Si ses parents sont indignes, pas une parcelle de leur indignité ne rejaillira sur Lucie !

– En vérité, l’amour vous affole ! Sachez donc que Lucie est la fille de Jeanne Fortier, l’assassin de votre père, et, comme vous refuseriez sans doute de me croire sur parole, je vais vous fournir la preuve irrécusable. »

Un cri sourd s’échappa du gosier contracté de Lucien. Il se laissa tomber sur une chaise, les yeux hagards.