Page:Montépin - La Porteuse de pain, 1973.djvu/330

Cette page n’a pas encore été corrigée

« Alors, dit-il, on cherche le monsieur bien vêtu ? Pourquoi un homme qui ne semble point appartenir à la classe des malfaiteurs aurait-il frappé cette jeune fille ?

– Je vous le, répète, par vengeance ou par haine.

– Alors, Melle Lucie devrait le connaître.

– Elle prétend qu’elle n’imagine pas qui ce peut être. Mais c’est une poseuse, une sainte-nitouche, et certain fait dont je me souviens me prouve que quelqu’un cherchait Lucie.

– Quel est ce fait, ma belle poulette ?

– La démarche qu’un intermédiaire fit à notre atelier. »

Ovide sentit un petit frisson courir sur son épiderme.

« Ah ! ah ! Un intermédiaire ! répéta-t-il.

– Oui… Il venait pour Lucie… Il apportait une lettre. Ne trouvant pas Lucie, il a demandé son adresse.

– Naturellement… Qu’est-ce que ça prouve ?

– Ça prouve qu’on s’occupait d’elle et qu’elle était connue de quelqu’un, tout en prétendant ne connaître personne.

– Mais vous causez… et votre assiette reste pleine.

– Je croyais vous intéresser en vous racontant cela, dit la jeune fille en regardant le pseudo-baron dans les yeux.

– Vous m’intéressiez certainement, mais j’ai vu dans ma vie nombre de choses autrement étranges que celle-là.

– N’en parlons plus, dit Melle Amanda, et revenons à vous. Qu’avez-vous fait dans votre voyage ?

– J’ai collectionné des petits papiers, répondit Ovide en riant, qui m’ont coûté pas mal d’argent… Des autographes !

– Et où êtes-vous allé faire cette singulière opération ?

– À Joigny. »

Ovide, à son tour, en prononçant ces mots, regardait fixement Melle Amanda. Il la vit tressaillir. Mais elle sut se donner bien vite un air indifférent.

« Ah ! vous étiez à Joigny ? fit-elle. Est-ce un joli pays ?

– Très joli, répondit Ovide, avec un nouveau sourire.