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tentative de meurtre sur le compte de rôdeurs de la banlieue.

– Et ce n’était point cela ?

– Il paraît. Les magistrats se sont ravisés.

– Ah ! ah ! fit Ovide avec vivacité. Comment donc ?

– Ils supposent maintenant que le vol n’était point le mobile de l’assassinat, mais une haine… une vengeance…

– Sur quoi les magistrats basent-ils cette supposition ?

– On a trouvé un indice.

– Un indice ? répéta Soliveau, haletant.

– On a trouvé le manche du couteau qui s’était brisé sur le busc du corset de Lucie, on a lu l’adresse du fabricant sur le tronçon de lame adhérant à ce manche, et on a découvert que le couteau avait été acheté la veille du crime, dans la soirée, par un monsieur bien vêtu et de bonne mine. Un monsieur grisonnant… d’une cinquantaine d’années… Mais je sens trembler votre bras… êtes-vous malade ?

– Non… non… je n’ai rien… dit Ovide, en faisant un effort surhumain pour reprendre son calme. Alors, on pense que ce monsieur, bien vêtu, aurait voulu tuer l’ouvrière ? Dans quel dessein ?

– On ne le sait pas encore, mais on le saura. Figurez-vous que ce monstre avait acheté un couteau dans la boutique du rez-de-chaussée de la maison même où demeure Lucie. Il a peut-être fait cette jolie emplette pendant que j’étais montée au sixième étage et que vous m’attendiez sur le quai. Vous auriez pu voir cet homme de la voiture où vous étiez resté ?

– Je l’ai peut-être vu, car je regardais précisément la boutique de coutellerie », répondit Ovide avec aplomb.

Amanda, trouvant que son adorateur platonique venait de parler avec un accent singulier, le regarda curieusement, et pour la première fois remarqua sa pâleur ; mais on arrivait au restaurant et elle ne put le questionner. On se mit à table dans le cabinet habituel et, aussitôt après le potage, Ovide renoua la conversation à l’endroit où elle avait été interrompue.