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Suivaient la date et la signature. Ovide lut cette pièce curieuse, la serra dans son portefeuille où se trouvaient déjà les billets de Duchemin, salua Mme Delion, retourna à l’hôtel de la Cigogne et commanda un déjeuner confortable de deux personnes.

Au moment où sonnaient onze heures, l’employé rejoignit Ovide dans un petit salon où ils avaient dîné la veille.

« Eh bien ? demanda le Dijonnais.

– J’ai ce qu’il vous faut, répondit Duchemin. Voici l’original de la déclaration écrite par Mme Frémy. »

Ovide prit vivement le papier, le déplia et lut :

« Moi, Mathurine Frémy, nourrice à Joigny, département de l’Yonne, après avoir déclaré au maire de Joigny qu’un enfant du sexe féminin, mis chez moi en nourrice le 12 avril 1861, avait été laissé à ma charge par la mère, Jeanne Fortier, arrêtée et condamnée depuis pour crimes qualifiés, j’ai été autorisée par monsieur le maire à déposer ladite petite fille à l’hospice des Enfants-Trouvés de Paris, ce que j’ai fait le 6 avril de l’année 1862, et voici les indications qui pourraient servir à reconnaître l’enfant, si sa mère ou toute autre personne intéressée la réclamait, indications reproduites sur le registre des dépôts à l’hospice :

« À l’enfant étaient joints : 1° Une chemise marquée L. F. ; 2° Une brassière, id. ; 3° Une paire de bas, id. ; 4° Un petit bonnet, id. ; 5° Un fichu de laine ; 6° Une couverture de coton ; 7° Une couverture de laine ; 8° Deux langes marqués J. F.

« Signes particuliers, néant. Nom de la mère : Jeanne Fortier. Prénom de l’enfant : Lucie. Nom de la nourrice : Mathurine Frémy. »

La signature de Mathurine Frémy, celle du maire pour légalisation et le cachet de la mairie donnaient à cette pièce un caractère indiscutable d’authenticité. Ovide, très calme en apparence, replia le papier et le mit dans sa poche.