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« Maintenant, monsieur, ajouta-t-il en s’adressant à Petitjean, tout est bien fini, n’est-ce pas ?

« Oui, répondit le négociant d’un ton bourru, et que votre honorable protégé aille se faire pendre ailleurs !

– Vous n’avez plus le droit d’être insolent, monsieur, répliqua Soliveau. Et prenez garde à votre langage ; si vous vous avisiez de parler d’une erreur dont la preuve a cessé d’exister, c’est à la famille Duchemin que vous auriez affaire ! »

Petitjean ferma d’une main brutale la porte de son bureau derrière les deux hommes qui s’éloignaient.

Le Dijonnais et son compagnon gagnèrent l’hôtel de la Cigogne, et s’attablèrent en face l’un de l’autre dans un petit salon où Ovide donna l’ordre de mettre le couvert. Heureux de se sentir débarrassé de son terrible créancier, le jeune homme voyait tout, en rose.

« Ou je me trompe fort, ou vous devez avoir encore quelques petites dettes dans Joigny… lui dit brusquement Ovide. Quel chiffre exact ?

– À peu près deux mille francs.

– Peste ! Vous allez bien, vous, quand vous vous y mettez !

– Monsieur, c’est cette misérable femme…

– Et comment comptez-vous faire pour payer ?

– Mes créanciers m’ont promis d’attendre.

– Vous vous verrez prochainement en butte aux criailleries de ces gens-là ! Eh ! bien, je vous débarrasserai d’eux, moi, en échange d’un service que j’attends de vous.

– Comptez sur moi, monsieur. Que faut-il faire ?

– Je vais vous le dire, dit Soliveau. Il y a vingt-deux ans, j’étais amoureux d’une femme mariée, et cette femme avait des bontés pour moi. En l’absence de son mari, absent depuis plus d’une année, un enfant vint au monde. À son retour le mari trompé ne soupçonna rien, et la femme coupable plaça l’enfant en nourrice à Joigny. Je fus obligé de quitter la France pendant un temps très long. Quand j’y revins, mon ancienne maîtresse avait disparu. L’enfant, confié par elle à une femme nommée Frémy, a été mis par cette femme à