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– A-t-on parlé devant vous d’une certaine Jeanne Fortier ?

– Jeanne Fortier… Jeanne Fortier… Qu’est-ce qu’elle était ?

– Une veuve… il y a vingt et un ans de cela…

– Mon doux Jésus ! vingt et un ans ! En faudrait une mémoire pour se rappeler les noms de si loin ! Si vous n’avez pas autre chose que le nom pour que je vous renseigne, ça ne peut pas me suffire…

– J’ai autre chose… La veuve Fortier fut condamnée, pour le triple crime de vol, d’incendie et d’assassinat.

– Bonté divine ! la gueuse ! L’a-t-on guillotinée ?

– On l’a condamnée à perpétuité, dit Ovide, et elle avait ici, à Joigny, en nourrice, une petite fille de quelques mois.

– Attendez donc ! Une femme qu’a été condamnée pour incendie, vol et assassinat… Oui… on en a causé dans le pays…

– Et vous vous souvenez chez qui sa fille se trouvait ?

– Chez la mère Frémy, parbleu ! Même qu’elle était assez vexée d’avoir en garde l’enfant d’une pareille scélérate.

– Et où demeure la mère Frémy ? demanda Ovide.

– Au cimetière, la pauvre femme… Elle est morte.

– Tout m’échappe ! murmura Soliveau déconfit.

– Seriez-vous le papa, vous par hasard ?

– Non ! J’ai besoin de savoir si la petite est vivante.

– Je me souviens de ce que la mère Frémy en a fait. Adressez-vous à la mairie… Quand on nous laisse des enfants, c’est là que nous allons faire notre déclaration. Le maire donne des ordres pour aller conduire le mioche aux Enfants-Trouvés…

– Laissez-vous alors au maire la nomenclature des objets qui peuvent servir un jour à faire reconnaître l’enfant ?

– Oui, monsieur. On indique la marque du linge, les signes particuliers du moutard, le nom du père et de la mère (si on les connaît), celui de la nourrice et la date du dépôt.

– L’enfant s’appelait « Lucie ». On aurait donc inscrit