Page:Montépin - La Porteuse de pain, 1973.djvu/305

Cette page n’a pas encore été corrigée

Si Paul Harmant avait interrogé sa fille au sujet des premières années de Lucie, c’est que la pensée dont nous avons signalé l’éclosion dans son cerveau se développait de plus en plus. Maintenant, il possédait des renseignements certains. Il ne lui restait qu’à voir sans retard Ovide Soliveau pour lui apprendre que sa victime se portait bien.

Le millionnaire se fit conduire avenue de Clichy. Soliveau était absent. Paul Harmant tira de sa poche un carnet et sur l’une des feuilles écrivit ces lignes, qu’il déposa dans la boîte aux lettres.

« Si tu rentres avant cinq heures du soir, viens vite à Courbevoie. Si tu rentres après six heures, je t’attendrai ce soir, à dix heures, au café de la Paix, place de l’Opéra. Urgent. »

En rentrant, Ovide trouva le billet de son pseudo-cousin. Très intrigué, un peu inquiet, Ovide se fit conduire à l’usine de Courbevoie. Il fut à l’instant même introduit. Paul Harmant avait le visage lugubre.

« Quelle physionomie sinistre ! lui dit le Dijonnais.

– Lucie est vivante ! répondit le millionnaire.

– Lucie est vivante !… répéta Soliveau en pâlissant. C’est impossible… Mon couteau est allé jusqu’au cœur…

– Je l’ai vue et lui ai parlé chez moi. Ton couteau a dévié sur les baleines du corset et n’a fait qu’une entaille. Lucie a repris son travail… Plus que jamais elle entrave mes projets.

– Tonnerre !… fit Ovide. C’est jouer de malheur ! Elle m’a vu, sans doute. Elle peut me reconnaître !

– Rassure-toi. Les ténèbres étaient épaisses et le crime est mis sur le compte de quelque rôdeur.

– Dans ce cas, on en sera quitte pour recommencer.

– Il faut bien s’en garder ! répliqua Jacques Garaud. Une seconde tentative du même genre ferait à coup sûr naître des soupçons… ce qu’avant tout il faut éviter.

– Alors tu abandonnes la partie ? demanda Soliveau.

– Lorsque la vie de ma fille est l’enjeu ! Jamais !

– Tu as un plan ? »

Paul Harmant tendit un papier à son complice, qui le prit curieusement et lut les lignes suivantes :