« Tout est prêt pour rendre l’alibi indiscutable, dit Paul Harmant… À six heures nous dînerons. »
L’industriel étala sur son bureau des plans de machines, et les deux misérables feignirent de parler mécanique.
« À quelle heure ton cocher sera-t-il ici ? demanda Soliveau, toujours en anglais.
– À minuit et demi, et il attendra sur le quai. La petite ira-t-elle là-bas seule ou accompagnée ?
– Seule. »
Le couvert étant mis, la femme du gardien se retira. Ovide tira de sa poche pour le montrer à Paul Harmant, le couteau acheté dans la boutique du quai Bourbon. La lame neuve étincelait. Six heures sonnèrent à la pendule. Le garçon de bureau parut, introduisant le garçon du restaurant qui apportait le dîner dans une grande malle d’osier.
« Marchais, vous nous servirez, commanda Paul Harmant ; vous, ajouta-t-il, en s’adressant à l’employé du restaurant, vous viendrez chercher tout cela demain matin… »
Le dîner fut court.
« Dois-je desservir ? demanda Marchais.
– Inutile… Laissez tout ainsi. »
À sept heures, Marchais vint s’informer si le patron avait encore besoin de lui.
« Non, répondit Paul Harmant. Donnez la consigne au gardien de ne me déranger sous aucun prétexte, et répétez-lui qu’il pourra se mettre au lit à son heure habituelle. »
Le Dijonnais commença de se travestir. Au bout de cinq minutes, il se tourna vers son ex-associé qui l’avait regardé faire sans prononcer un mot.
« Mets mes frusques en lieu sûr, dit-il. Et maintenant conduis-moi à la porte dont tu m’as parlé… »
Toujours sans mot dire, le millionnaire prit une clef dans son tiroir et fit signe à Ovide de le suivre. L’obscurité était complète ; la lune ne devait se lever que plus tard. Un silence absolu régnait. Ils traversèrent une