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Lucien expliqua la besogne dont il avait dû se charger sur la demande de Paul Harmant.

« C’est bien, alors ; vous êtes pardonné, dit Lucie.

– Maman Lison ne déjeune pas avec nous ? demanda Lucien, en s’asseyant devant la table servie de façon coquette.

– Non, mon ami. Pauvre maman Lison, elle n’a pas un moment de liberté ! Mme Lebret, sa patronne, est malade, et maman Lison passe ses nuits à la veiller. Ce qui ne l’empêche pas de porter le pain deux fois par jour.

– Vous l’aimez bien, cette brave femme, n’est-ce pas ? Et vous avez raison ! Je suis sûr qu’elle le mérite.

– Sitôt que nous serons mariés, mon Lucien, nous la prendrons avec nous.

– Ce sera bientôt, chère mignonne, s’il plaît à Dieu ! Si vous saviez comme j’ai hâte d’arriver au jour du bonheur !… »

Et Lucien voulut embrasser de nouveau sa fiancée. Elle le repoussa doucement, sans pruderie mais avec fermeté.

« Nous ne sommes pas encore mariés… dit-elle en riant. Mettez ces baisers-là à la caisse d’épargne. Comment trouvez-vous ces côtelettes ? Elles sont un peu trop cuites, hein !…

– Je ne m’en aperçois pas.

– Êtes-vous toujours aussi satisfait de votre position chez M. Harmant ?

– Toujours… Mon patron me témoigne la confiance la plus flatteuse… et, à ce sujet, je dois vous apprendre une chose qui va vous contrarier : nous allons passer deux dimanches sans nous voir… »

Les yeux de la jeune fille se remplirent de larmes.

« Deux dimanches sans nous voir ! répéta-t-elle. Pourquoi ?

– M. Harmant m’envoie à Bellegarde pour l’y représenter et y installer des pièces de mécanique importantes.

– C’est favorable à nos intérêts, cela ?

– C’est favorable, oui, chère mignonne.