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L’ex-contremaître qui marchait à grands pas dans son cabinet s’arrêta brusquement.

« Un complice… murmura-t-il. Mais ce sera me mettre sous la domination de cet homme, comme je suis déjà à la merci du misérable Ovide Soliveau… Ovide Soliveau… Pourquoi ne m’adresserais-je pas à lui ? Son intérêt est de me servir, et la perspective de gagner de l’argent le rendra capable de tout. Décidément, Ovide est l’instrument qu’il me faut. Je le verrai ce soir. »

Vers quatre heures de l’après-midi, Lucien Labroue vint avertir M. Harmant que la mise en caisse des grandes pièces à destination de Bellegarde était terminée et qu’on s’occupait du chargement sur les camions.

« Bien… » répondit l’industriel qui ajouta, en prenant divers papiers sur son bureau :

« Voici les plans des travaux que vous aurez à diriger à Bellegarde, et voici les projets de ceux à exécuter. Voici en outre deux bons à toucher à la caisse ; l’un est de cinq mille francs et représente votre indemnité de déplacement. L’autre est de quinze cents : il vous servira à défrayer de toutes choses les ouvriers qui les accompagnent. Bon voyage et écrivez-moi tous les jours. »

Lucien Labroue serra la main que lui tendait son patron et se retira. L’industriel monta dans sa voiture.

« Aux Batignolles… avenue de Clichy. Vous ferez halte à l’entrée de l’avenue… »

À l’endroit désigné, Jacques Garaud descendit, commanda de l’attendre, et suivit à pied l’avenue jusqu’au numéro indiqué par Ovide. Là, il se trouva en face d’un mur que trouait une porte. Derrière ce mur, on apercevait le toit d’un pavillon entouré d’arbres. Il agita vigoureusement la sonnette. Quelques secondes s’écoulèrent. Ovide Soliveau parut, rasé de frais, le chapeau sur la tête, vêtu avec soin, bien chaussé, bien ganté. Évidemment il se préparait à sortir. Il poussa une exclamation.

« Toi, cousin ! dit-il ensuite. Voilà de la chance ! Cinq minutes plus tard tu ne me trouvais pas.

– Est-ce une affaire importante qui t’appelle au-dehors ?