Page:Montépin - La Porteuse de pain, 1973.djvu/214

Cette page n’a pas encore été corrigée

« Si vous retrouvez cet homme, que vous supposez vivant, que ferez-vous ?

– Je m’assurerai qu’il est vraiment le meurtrier de mon père, je lui rendrai le mal pour le mal, et je solliciterai la réhabilitation de la pauvre martyre.

– Peut-être est-elle morte… murmura Jeanne.

– Je saurai bientôt à quoi m’en tenir à ce sujet… Un de mes amis, un avocat qui jouit au Palais d’une considération très grande, doit faire en sorte d’apprendre dans quelle prison Jeanne Fortier a été conduite… Si elle est vivante, je lui promettrai de faire tout au monde pour obtenir sa mise en liberté, et je tiendrai parole, car un pressentiment m’avertit que je retrouverai tôt ou tard l’assassin de mon père. »

Pour la seconde fois Jeanne fut sur le point de se trahir. Ses lèvres s’agitèrent pour crier à Lucien :

« Celle que vous voulez chercher n’est pas morte… Elle est près de vous… c’est moi !… »

Mais ses lèvres n’achevèrent point le cri commencé. Une indiscrétion suffirait pour la faire arrêter. Cependant Jeanne hasarda ces mots :

« Cette femme avait des enfants. Que sont-ils devenus ?

– Je l’ignore. »

La veuve de Pierre Fortier baissa la tête et se tut. Lucien reprit, en s’adressant à sa fiancée :

« Ainsi, chère petite Lucie, vous êtes heureuse !

– Oh ! oui, bien, bien heureuse !

– Seulement, il va falloir nous voir moins souvent.

– Pourquoi donc ? demanda la jeune fille.

– M. Harmant, qui veut m’avoir toujours sous la main, désire que je me rapproche de la rue Murillo.

– Je le comprends, mon ami… fit Lucie d’un ton de résignation, votre présence en effet est indispensable. Les premiers jours, l’isolement me semblera cruel ; mais vous trouverez bien, de temps à autre, quelques minutes pour venir ici, et vous me donnerez tous vos dimanches…

– Chère adorée, je suis heureux de vous voir aussi