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malade ? interrompit l’ajusteur, devenu blanc comme un linge.

– Non, mais il recommande que vous ne vous attardiez point en sortant de l’atelier…

– Monsieur Jacques, reprit l’ouvrier tremblant de tout son corps, pour que le garçon vous ait arrêté, pour qu’il me recommande de ne pas m’attarder, moi qui ne m’attarde jamais, il faut que sa mère soit très mal… Monsieur Jacques, donnez-moi la permission d’aller jusqu’à la maison, ça me tranquillisera.

– Vous savez, mon pauvre Vincent, qu’il m’est impossible de prendre cela sur moi, répliqua le contremaître. Vous connaissez le règlement. Dès qu’on est entré dans l’usine, on ne peut plus en sortir qu’au coup de cloche.

– Une fois n’est pas coutume, et en demandant au patron…

– M. Labroue est absent.

– Ah ! pas de chance ! » fit l’ouvrier d’un ton désolé.

Jacques sortit de la salle des ajusteurs. Quand le contremaître eut disparu, l’ouvrier dépouilla vivement son tablier de travail, et, se dissimulant derrière les établis, quitta l’atelier sans qu’on fît attention à lui. Il traversa la grande cour en longeant les murailles et il arriva près de la porte de l’usine. Là, il donna deux petits coups dans le vitrage de la loge.

« M’ame Fortier, tirez-moi le cordon, s’il vous plaît, dit-il.

– Vous avez la permission de sortir ? demanda Jeanne.

– Non, mais le contremaître vient de rentrer, il m’a dit que mon garçon lui avait touché deux mots relativement à ma femme, qui est malade. Je crains que son état n’ait empiré. Pour me rassurer, je veux courir jusque chez nous…

– Mais, monsieur Vincent, je ne peux pas vous laisser sortir sans autorisation. Vous savez que la règle est formelle.

– Eh ! je me fiche pas mal de la règle ! répliqua l’ouvrier presque avec colère. Je veux aller voir ma femme… et j’irai.

– N’insistez pas, Vincent, je vous en prie ! Si le patron