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– Mets la lettre dans ton portefeuille, et demain, à dix heures, sonne à l’hôtel de la rue Murillo. »

Lucien, le lendemain, se préparait à se rendre chez Paul Harmant et mettait à sa toilette un soin minutieux. Avant de quitter la maison, il entra chez Lucie.

« Vous partez, mon ami ? demanda-t-elle.

– Oui, ma chère Lucie !… Je vais faire ma visite à un industriel riche à millions et prêt à continuer en France les affaires qui ont fait sa fortune en Amérique.

– Comment se nomme cet industriel ?

– Mon ami Georges m’avait fait promettre de taire ce nom jusqu’après ma visite, mais je ne puis avoir de secret pour vous. Il s’appelle Paul Harmant.

– Paul Harmant, rue Murillo ?

– Oui. Vous le connaissez !

– Non, mais je connais sa fille. C’est pour elle que j’ai fait dernièrement cette robe de soirée qui vous émerveillait. Et maintenant, je n’ai plus peur que vous échouiez. Melle Mary est charmante, bonne, douce, bienveillante, affectueuse, et le père d’une telle fille ne peut être qu’un homme excellent. Allez vite, mon ami. »

Lucien gagna le quartier aristocratique du parc Monceau. Sitôt arrivé, Mary le recevait. La jeune fille, ayant passé une bonne nuit, avait le visage moins fatigué, les traits moins tirés que de coutume. Elle était ravissante ainsi.

À l’entrée de Lucien elle se leva et fit deux pas au-devant du nouveau qui la salua respectueusement. D’un seul regard elle enveloppa le visiteur et trouva qu’il avait la taille élégante, la tournure distinguée, le visage intelligent et sympathique. Bref, il lui plut à première vue.

« Vous êtes, monsieur, dit-elle avec un sourire, très chaudement recommandé par M. Georges Darier pour qui mon père fait profession d’une estime toute particulière.

– Georges Darier, mademoiselle, est mon meilleur ami…

– Je vous attendais, monsieur.

– Georges m’a dit que vous voudriez bien me prêter