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« J’ai déjà trop parlé… » pensa-t-elle.

Puis, s’adressant au prêtre :

« Je vous l’ai dit, ce n’est point pour moi que je questionnais. L’amie qui m’envoie m’avait suppliée d’insister afin d’obtenir un indice au sujet de l’enfant… Je voulais savoir le nom de la sœur du curé Laugier, afin de savoir celui de son fils.

– Quelqu’un a donc un intérêt à retrouver ce fils ?

– Je l’ignore ; on m’a chargée d’une mission, je m’en suis acquittée, voilà tout.

– Voyez dans le village… Peut-être trouverez-vous quelqu’un qui vous renseignera mieux que moi. »

Le prêtre sortit de l’église, quittant Jeanne éperdue. La pauvre femme se laissa tomber à genoux sur les dalles.

« Mon Dieu !… mon Dieu !… balbutia-t-elle en joignant les mains, je ne saurai rien !… Tout semble me repousser !… Ce prêtre se défiait de moi. Que j’aille en interroger d’autres, une défiance pareille s’éveillera. Que faire ?

« Un homme a emmené à Paris un enfant qu’on disait le neveu de l’abbé Laugier. Cet enfant doit être le mien. La sœur du curé de Chevry m’avait promis de veiller sur lui, de lui servir de mère. Mais, à Paris, où le retrouver ?

« Aller droit aux gens qui pourraient me répondre, c’est me livrer aux gendarmes… Comme il y a vingt et un ans, on me cherche. Mieux aurait valu rester folle ! »

Jeanne, pendant quelques secondes, sanglota.

« Eh bien, reprit-elle tout à coup en relevant la tête, je ne me reconnais point vaincue ! Je chercherai sans trêve et sans relâche. Mon fils doit être à Paris. C’est à Paris que je viendrai me mettre sur sa piste, quand j’aurai tâché de savoir ce que ma fille est devenue !… »

Elle sortit de l’église, et, à neuf heures du soir, elle était de retour à Paris.

Le lendemain, à la première heure, elle se rendait à Joigny ; elle alla droit à la maison de la veuve Frémy, la nourrice à laquelle, vingt-deux années auparavant,