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« On l’a condamnée… fit Étienne.

– Eh ! monsieur, qu’est-ce que cela prouve !

– Les preuves de culpabilité abondaient.

– Avez-vous suivi le procès, monsieur ?

– Oui, de la façon la plus attentive.

– Et votre conviction après les débats ?

– Fut que l’accusée pouvait être coupable.

– Qu’elle pouvait être ! Donc vous n’oseriez point affirmer la culpabilité, et si vous aviez fait partie du jury vous vous seriez prononcé pour la négative.

– C’est possible… dit Étienne. C’est même probable.

– J’ai lu le procès, moi, monsieur. Je suis convaincu que Jeanne Fortier était innocente.

– Ah ! murmura Georges, cette malheureuse femme se nommait Jeanne Fortier ?

– Oui, » répondit Lucien.

Puis s’adressant à Étienne Castel :

« Vous souvenez-vous de ce qu’elle alléguait pour sa défense ?

– Parfaitement… un misérable contremaître à l’usine la poursuivait de son amour et convoitait la fortune de votre père, se proposant de quitter la France avec l’argent volé et d’emmener Jeanne devenue sa maîtresse. Cet homme, qui se nommait Jacques Garaud, lui avait écrit (disait-elle) une lettre où se trouvait la preuve indiscutable du crime médité et accompli par lui. Mais cette lettre, elle ne put la produire.

– C’est vrai… dit Lucien, et pourtant, soyez certain que la lettre existait. Garaud était bien le voleur, l’incendiaire, l’assassin.

– Cet homme est mort victime de son dévouement !

– Rien n’est moins sûr… Je ne crois pas à cette mort, et ma tante n’y croyait pas non plus. Je me suis promis de faire un jour tout ce qui dépendrait de moi pour arracher son masque au véritable assassin de mon père, et pour obtenir la réhabilitation de la pauvre créature injustement condamnée.

– À quoi cela vous servirait-il ? Vingt et un ans se sont écoulés depuis le crime commis. Il y a prescription.

– Que m’importe ? Si la justice humaine ne peut me