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En racontant ce qui précède, Étienne Castel avait les yeux fixés sur le visage de Georges, étudiant l’effet produit par ses paroles. Georges écouta sans tressaillir.

« C’est singulier… dit-il. On prétend que les impressions d’un enfant sont ineffaçables. Il n’en est point ainsi pour moi… Tout a disparu… Quel âge avais-je donc à cette époque ?

– Trois ans et demi.

– Je ne me souviens de rien de cet âge.

– Cherche bien.

– J’ai beau chercher. C’est la nuit… l’obscurité complète.

– Eh bien, reprit Étienne Castel, tu avais auprès de toi, dans le jardin où la scène se passait, le petit cheval donné par ta mère, et comme je veux soigner tous les détails, j’ai besoin du joujou en question pour le peindre d’après nature.

– Je vous le ferai porter, ou je vous le porterai.

– Je te remercie d’avance.

– D’après ce que vous venez de me dire, les portraits de ma mère, de mon oncle, le vôtre se trouvent sur cette toile ?

– Et le tien, oui.

– Avez-vous le projet de vendre le tableau en question ! Je n’ai encore chez moi rien de vous, et je vous achèterais ce tableau qui serait pour moi plus et mieux qu’une œuvre d’art.

– Tu es donc bien riche ! Tu sais que je vends très cher.

– Je sais cela. Mais je sais que vous me traiterez en ami.

– Tu es vraiment bête, mon pauvre enfant ! N’as-tu donc pas compris que ce tableau est à toi, et que si je le retouche, c’est uniquement pour te l’offrir ?…

– Ah ! cher tuteur !…

– C’est une surprise que je voulais te faire. Mais va te promener !… Le jour où j’aurai fini, le tableau sera chez toi. Prépare-lui donc une belle place.

– Ah ! que vous êtes bon, cher tuteur ! Mais, dites-moi,