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« Georges Darier, avocat, rue Bonaparte n° 19. »

« Grand merci… dit Jacques. J’y vais de ce pas… »

Georges, l’enfant d’adoption de Mme Clarisse Darier, confié par le curé Laugier au peintre Étienne Castel, avait fait son chemin et réalisé les espérances que ses aptitudes permettaient de concevoir. Dans quelques mois il allait atteindre sa vingt-cinquième année. C’était un beau garçon. Inscrit depuis deux ans au tableau des avocats du barreau de Paris, il avait déjà fait ses preuves.

Il habitait un appartement au second étage de la maison portant le numéro 19 de la rue Bonaparte. Dans son cabinet de travail, meublé en chêne sculpté, deux objets formaient disparate avec le luxe sévère de l’ensemble. C’était d’abord une petite bibliothèque d’acajou pleine de livres, souvenir du bon curé Laugier. C’était ensuite, dans un angle, une colonne en ébène supportant un petit cheval de bois et de carton, recouvert d’un crêpe noir. Georges conservait cet humble jouet comme une relique, le croyant un cadeau de sa mère Clarisse Darier.

Le jeune homme étudiait un dossier volumineux au moment où sa domestique lui apporta la carte de Paul Harmant.

« Faites entrer », dit-il.

Jacques Garaud franchit le seuil du cabinet. Georges quitta son siège et fit deux pas au-devant de lui. Après vingt et un ans écoulés, le misérable, cause de tous les malheurs de Jeanne Fortier, se trouvait en présence du fils de sa victime.

L’incendiaire d’Alfortville, l’assassin de M. Labroue, avait cinquante ans. Ses cheveux, qu’il ne teignait plus, étaient blancs. Âgé seulement de trois ans et demi à l’époque des événements dramatiques formant en quelque sorte le prologue de ce récit, Georges ne pouvait garder aucun souvenir de la physionomie du contremaître. Le faux Paul Harmant prit la parole pour se présenter et exposer son affaire, puis produisit une copie de son acte d’acquisition. Georges lut avec attention cet acte et dit :