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fixa aux environs du collège Henri-IV où elle plaça Lucien.

Presque au moment où se passaient ces choses au presbytère de Chevry, Noémi Mortimer mourait à New York, laissant à son mari, le faux Paul Harmant, une petite fille de huit ans, chétive et frêle. Jacques Garaud aimait sa femme avec adoration. Sa douleur fut effrayante. James Mortimer, frappé au cœur, ne survécut pas longtemps à sa fille qu’il aimait plus que tout au monde. Miné par le chagrin, il s’éteignit, laissant son gendre à la tête des plus belles affaires industrielles des États-Unis.

Ovide Soliveau, possesseur du secret de Jacques, n’avait point quitté son prétendu cousin. Depuis neuf ans il était resté muet, les procédés de Jacques à son égard ne lui permettant pas de lui mettre le couteau sur la gorge. Il puisait comme bon lui semblait dans la caisse toujours ouverte du gendre de James Mortimer. Devenu de plus en plus joueur, il perdait habituellement d’assez fortes sommes, et le pseudo-Paul Harmant payait sans sourciller. Étant donné cet état de choses, le prétexte manquait à Ovide pour se faire une arme du secret qu’il avait surpris. Une circonstance imprévue devait l’amener à se départir de sa réserve.

* * *

Ainsi le hasard mettait côte à côte le fils de la victime et celui de la malheureuse femme condamnée pour le crime qu’elle n’avait point commis, et ces deux enfants devaient bientôt devenir des camarades inséparables. En effet, quoique ayant deux ans de moins que Lucien, Georges, plus précoce, se trouvait dans la même classe que le neveu de Mme Bertin, et suivait les mêmes cours. Il leur fallut se quitter le jour où Lucien sortit du Collège pour entrer à l’École des Arts-et-Métiers, mais une séparation momentanée ne pouvait rompre les liens de leur amitié.

Mme Bertin ne possédait qu’une aisance très modeste. Sa petite fortune consistant en une rente viagère de