« On voit, mademoiselle, lui dit-il, que vous avez habité en France, et non seulement la France, mais Paris. »
La jeune fille ne se montra point choquée et demanda d’une voix douce, avec un demi-sourire :
« À quoi voit-on cela, monsieur, s’il vous plaît ? À ce que vous n’interpréteriez pas cette musique d’une façon tellement vivante, si vous ne l’aviez entendue à Paris. J’y retrouve toutes les nuances de mon cher pays.
– Ah ! vous êtes Français, monsieur ?
– Oui, mademoiselle.
– Eh bien, vous avez raison. J’ai entendu ces motifs à Paris… Ils m’ont paru charmants et je les ai retenus.
– Vous avez une mémoire prodigieuse.
– Pour ce qui me plaît, oui.
– Avez-vous longtemps habité Paris, mademoiselle ?
– Trois mois seulement… J’aurais voulu y passer une année au moins, mais il n’a pas été possible à mon père de donner satisfaction à mes désirs. Ses affaires le rappellent à New York, où je vais rentrer un peu malgré moi, après ce trop court voyage.
– Moi aussi je vais à New York… Je suis mécanicien et je me propose de faire des études dans différentes maisons dont on vante les inventions, la maison Mortimer entre autres. »
Noémi regarda son interlocuteur en souriant.
« Parlez-vous de la maison Mortimer ? demanda-t-elle.
– Oui, mademoiselle… La maison James Mortimer, dont le chef possède en Europe la réputation d’un homme de génie.
– Connaissez-vous celui de qui vous faites un si bel éloge ?
– Non, mademoiselle. Comment le connaîtrais-je, puisque je vais pour la première fois en Amérique ? répliqua l’ex-contremaître avec un aplomb superbe.
– Et votre intention est de vous rendre chez lui en arrivant à New York.
– Ma première visite sera pour lui, mademoiselle.