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ineffaçable, son idée et son sentiment. Déjà dans ses premiers livres cette conception musicale du style se fait sentir, quoique avec moins de force. Nous en trouvons de nombreux exemples dans le Peuple. Quatre lignes font un tableau complet de la grandeur déserte et désolée de l’empire romain en décadence : « Des voies magnifiques attendaient toujours le voyageur qui ne passait plus, de somptueux aqueducs continuaient de porter des fleuves aux cités silencieuses et n’y trouvaient plus personne à désaltérer. »

Dans les dernières années de sa vie, Michelet, entraîné inconsciemment par ses tendances au rythme, a fini par retomber fréquemment dans les mêmes cadences. Son esprit s’accoutuma involontairement à la mesure des vers de six, huit et douze syllabes, et l’on trouve dans la Montagne, dans Nos Fils, et déjà même dans la Sorcière, des pages entières en vers blancs. Quelquefois ce rythme un peu monotone produit encore de très beaux effets ; par exemple, dans cette page de la Sorcière :

« C’est aussi véritablement une cruelle invention d’avoir tiré la fête des Morts du printemps où l’antiquité la plaçait, pour la mettre