Page:Monet - Invantaire des deux langues - 1635, A-C.djvu/20

Cette page n’a pas encore été corrigée
AU LECTEUR
d’an anatomiser d’autres, autant, pour le moins, extravagans, que celui-ci, pour n’abuser de la patiance du Lecteur.

An suite donques, de ce que ie viens de prouver, ie me sans, & porte pour antieremant dechargé, de represanter, par des lettres dormantes, superfluës, importunes, les vestiges de l’etymologie Romaine, és mots de notre langue : & ce d’autant plus convenablemant à la bien-sceance de cet idiome, que toutes les Gaulles se sont, de toute memoire, departies de cete Regle Etymologique, és quatre-vints, & dixneuf parties de çant, en tout le cors de leur langue.

C’est à vous, MESSIEURS LES ZELATEURS ETYMOLOGIQUES de persuader, par puissantes raisons, à toute la France de se ranger à vos MAXIMES, au fait de cete Reforme langagere, & ce, an dressant bien à propos l’etat de votre Regle Etymologisante, dont vous avés le dessein bien avant imprimé dans l’ame, Zelatrice de l’integrité des langues. Et quand il paroitra manifestemant, que vous aurés operé sur les volontés de tout ce Roiaume pour cet effet : ie proteste, que ie serai le premier à reformer tout ce, que i’ai ecrit hors de la teneur de vos Maximes, que le suivrai punctuelemant le reste de mes iours. Et ie ne veus, ni peus douter, que votre sollicitude pour le bien public, ne s’etande au de là des livres François, à remettre an etat les Latins, & les Grecs, au suiet, que ie vous ai marqué ci devant, & que vous sçavés trop mieus : an quoi vous obligerés tout ce grand monde d’hommes lettrés, qui foisonnent an notre France ; & recueillirés outre ce, l’aplaudissemant universel de cete nation, & imprimerés an son ame une eternele memoire de vos grans merites.

Mais il importe fort à votre reputation, que certains petits Argolets, qui se qualifient de votre Esquadre, mais sans adveu, n’etandent pas le suiet de votre Reformation Etymologique, au de là de ses limites natureles, & ne me querelent point, hors de propos, an cete matiere. Ils se figurent, voire se promettent bien asseurémant, que, dans votre BUREAU CRITIQUE DES LANGUES, leur sera donné acte, d’avoir deüemant procedé, à me solliciter d’ecrire : En, non pas An, pour De, Ex, Latins an fait de lieu, de source : item, En, pour, De ce, De cela : & de meme, ces autres mots ; Encor, Encore, Endeter, Enditer, Endive, Entendre, Entendement, Envoi, Envoier : Item ces autres, pour le regard de leur seconde syllabe : Apprendre, Apprentis, Apprentissage, Attendre, Attendu, Attente : & apres ceus-ci, une infinité de tels propres termes de notre langue, comme s’ils avoient bien quelque raport par voie d’extraction, ou autremant, avec le langage Romain, d’où suivit quelque devoir à les lui conformer par l’ecriture : mais ancore que cela fut, i’ai fait voir ci devant, par vives raisons, que ie ne suis point obligé à cete regle. Neantmoins, quand votre sollicitude, à tousiours proceder regulieremant, negligeroit ce dernier chef, & laisseroit agir ces Carabins à leur discretion : les petits grimaus , de leur mouvemant, huëroient, & sifleroient ces docteurs à simple semelle, & leur fermeroient aisémant la bouche.

Mais quant au principal point, de la reduction des trois langues susdites, aus vraies racines Etymologiques, pour le regard de ce qu’elles ont amprunté des autres idiomes, & grandemant alteré : & au son, & an l’ecriture : ie me veus promettre, & de votre zele, & de votre extraordinaire suffisance, que, dans peu de mois, vous an ferés voir à notre siecle un chef-d’œuvre digne de vous : & me donnerés suiet d’aimer, & benir notre conteste, an matiere d’orthographe, qui aura fourni la cause, fortuitemant, & hors d’attante, à un si profitable, si riche, & si genereus ouvrage.