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SUPRÉMATIE DE ROME DANS LE LATIUM

n’est point à cause de la puissance ou de la richesse fort problématiques de la ville vaincue. Mais, celle-ci, métropole de la confédération latine, avait la préséance sur les trente villes alliées. Sa destruction consommée, la fédération ne tomba point pour cela : pas plus que n’était tombée la ligue bœotienne après la chute de Thèbes[1]. Seulement, chose en tous points conforme au droit des gens d’alors, et au régime privé des guerres entre les peuples latins, Rome soutint qu’elle avait succédé aux privilèges d’Albe, et revendiqua la présidence de la ligue. Sa prétention fut-elle admise de plein droit ? Y eut-il lutte, au contraire, soit avant, soit après cette revendication ? On l’ignore. Ce qu’il y a de sûr, c’est que l’hégémonie de Rome fut à peu de temps de là généralement acceptée, sauf en deux ou trois localités, qui comme Labicum et surtout Gabies, réussirent quelque temps à s’y soustraire. À cette époque, déjà, la mer faisait Rome puissante en face de la région intérieure : véritable ville, elle l’emportait sur les bourgades d’alentour : cité fortement unie, elle était prépondérante au milieu d’une fédération de petites villes. C’était enfin par elle, et avec elle seule, que les Latins pouvaient défendre leurs côtes contre les Carthaginois, les Hellènes et les Étrusques ; repousser de leurs frontières leurs voisins remuants des contrées Sabelliques, et s’agrandir même en les refoulant. J’admets que la destruction d’Albe n’a pas plus agrandi le territoire romain que ne l’a fait la conquête d’Antemnœ ou de Collatie : j’admets, si l’on veut, que, bien avant la prise d’Albe, Rome était déjà la cité la plus puissante parmi

  1. Il paraît même que la cité de Bovilles a été formée d’une fraction de l’ancien territoire albain, et qu’elle est entrée dans la ligue des villes latines autonomes, à la place d’Albe. L’origine est attestée par les cérémonies religieuses de la gens Julia, et par les inscriptions où on lit : « Albani Longani Bovillenses » (Orelli-Henzen, 119, 2252, 6019) : l’autonomie est attestée par Denys d’Hal. 5, 61 ; et par Cic., pro Planc., 9, 23.