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SCÈNE XIX.

Monsieur Tibaudier.

Je suis ravi, Madame, que vous me concédiez la grace d’embrasser monsieur le comte votre fils. On ne peut pas aimer le tronc, qu’on n’aime aussi les branches.

La Comtesse.

Mon Dieu ! monsieur Tibaudier, de quelle comparaison vous servez-vous là ?

Julie.

En vérité, madame, monsieur le comte a tout à fait bon air.

Le Vicomte.

Voilà un jeune gentilhomme qui vient bien dans le monde.

Julie.

Qui diroit que madame eût un si grand enfant ?

La Comtesse.

Hélas ! quand je le fis, j’étois si jeune, que je me jouois encore avec une poupée.

Julie.

C’est monsieur votre frère, et non pas monsieur votre fils.

La Comtesse.

Monsieur Bobinet, ayez bien soin au moins de son éducation.

Monsieur Bobinet.

Madame, je n’oublierai aucune chose pour cultiver cette jeune plante, dont vos bontés m’ont fait l’honneur de me confier la conduite ; et je tâcherai de lui inculquer les semences de la vertu.

La Comtesse.

Monsieur Bobinet, faites-lui un peu dire quelque petite galanterie de ce que vous lui apprenez.

Monsieur Bobinet.

Allons, monsieur le comte, récitez votre leçon d’hier au matin.

Le Comte.

Omne viro soli quod convenit esto virile,
Omne viri…

La Comtesse.

Fi ! monsieur Bobinet ; quelles sottises est-ce que vous lui apprenez là[1] ?

  1. On croit que cette scène fut inspirée à Molière par une scène à peu près semblable qui s’était passée chez madame de Villarceaux, dont le mari avait la
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