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ACTE I, SCÈNE II.

MAÎTRE À DANSER.

La musique et la danse… La musique et la danse, c’est là tout ce qu’il faut.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Il n’y a rien qui soit si utile dans un État que la musique.

LE MAÎTRE À DANSER.

Il n’y a rien qui soit si nécessaire aux hommes que la danse.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Sans la musique, un État ne peut subsister,

LE MAÎTRE À DANSER.

Sans la danse, un homme ne sauroit rien faire.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Tous les désordres, toutes les guerres qu’on voit dans le monde, n’arrivent que pour n’apprendre pas la musique.

LE MAÎTRE À DANSER.

Tous les malheurs des hommes, tous les revers funestes dont les histoires sont remplies, les bévues des politiques, et les manquements des grands capitaines, tout cela n’est venu que faute de savoir danser.

MONSIEUR JOURDAIN.

Comment cela ?

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

La guerre ne vient-elle pas d’un manque d’union entre les hommes ?

MONSIEUR JOURDAIN.

Cela est vrai.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Et si tous les hommes apprenoient la musique, ne seroit-ce pas le moyen de s’accorder ensemble, et de voir dans le monde la paix universelle ?

MONSIEUR JOURDAIN.

Vous avez raison.

LE MAÎTRE À DANSER.

Lorsqu’un homme a commis un manquement dans sa conduite, soit aux affaires de sa famille, ou au gouvernement d’un État, ou au commandement d’une armée, ne dit-on pas toujours : Un tel a fait un mauvais pas dans telle affaire[1] ?

  1. Var. Dans une telle affaire.