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Sganarelle

Qu’elle s’en garde bien ! Il ne faut pas qu’elle meure sans l’ordonnance du médecin[1].

Géronte

Allons, un siège.

Sganarelle, assis entre Géronte et Lucinde.

Voilà une malade qui n’est pas tant dégoûtante, et je tiens qu’un homme bien sain s’en accommoderoit assez.

Géronte

Vous l’avez fait rire, monsieur.

Sganarelle

Tant mieux : lorsque le médecin fait rire le malade, c’est le meilleur signe du monde. (à Lucinde.) Hé bien ! de quoi est-il question ? Qu’avez-vous ? quel est le mal que vous sentez ?

Lucinde, répond par signes, en portant la main à sa bouche, à sa tête et son menton

Han, hi, hou, han.

Sganarelle

Hé ! que dites-vous ?

Lucinde, continue les mêmes gestes.

Han, hi, hon, han, han, hi, hon.

Sganarelle

Quoi ?

Lucinde

Han, hi, hon.

Sganarelle, la contrefaisant

Han, hi, hon, han, ha. Je ne vous entends point. Quel diable de langage est-ce là ?

Géronte

Monsieur, c’est là sa maladie. Elle est devenue muette, sans que jusques ici on en ait pu savoir la cause ; et c’est un accident qui a fait reculer son mariage.

Sganarelle

Et pourquoi ?

  1. Ce passage est tiré de la farce du Médecin volant :
    Gorgibus

    « Monsieur le médecin, j’ai grand’peur qu’elle ne meure.

    Sgnarelle

    Ah ! qu’elle s’en garde bien ! Il ne faut pas qu’elle s’amuse à se mieux mourir sans l’ordonnance de la médecine.»